ISM a procédé aux premières observations en infrarouge de Phobos, avec une résolution au sol de 700 m. Le cube-image ISM est ici projeté sur une image acquise simultanément par la caméra (VSK). Le critère spectral représenté est la profondeur de la bande d’absorption des silicates à 1 micron, qui est une mesure de l’abondance locale en minéraux ferro-magnésiens (olivine et pyroxènes ; les fortes abondances sont représentées en bleu). L’image du bas est le rapport entre les intensités mesurées dans les deux canaux spectraux de la caméra (visible et proche infrarouge) sur la zone observée par ISM – on remarque la bonne corrélation entre ces deux images.
Ces deux critères sont parmi les plus importants pour comparer Phobos avec les astéroïdes et les météorites, et déterminer son origine et son évolution. La comparaison avec les observations de la caméra et du spectromètre UV-visible de la mission (KRFM) a montré a posteriori qu’ISM n’a observé qu’une seule des deux unités géologiques majeures de la surface, la plus homogène. Une unité plus bleu est présente sur l’autre face de Phobos, autour de Stickney (le plus grand cratère de Phobos).
ISM performed the first observations of Phobos in the NIR, with a resolution of 700 m. The ISM image cube is projected on an image acquired simultaneously by the spacecraft camera (VSK). The spectral parameter shown above is the depth of the 1 µm band, representative of the abundance in mafic minerals (higher abundances in blue); the bottom image is the visible / NIR ratio as measured by the camera on the area observed by ISM – notice the good correlation.
These two parameters are among the most useful to compare Phobos to asteroids and meteorite analogs, and to infer its origin and evolution. Comparisons with observations by the camera and the UV-visible spectrometer (KRFM) showed afterwards that ISM spanned only one of the two major units on the surface, the most homogeneous one. A bluer unit is observed in the vicinity of Stickney on the other side of Phobos.
Les propriétés observées par ISM sont les suivantes :
- faibles variations d’albédo (les variations observées de réflectance sont corrélées à la pente des terrains) ;
- continuum à pente très marquée en infrarouge ;
- absence totale d’absorption à 3 µm, qui trahit un très faible degré d’hydratation des terrains observés ;
- présence d’une bande d’absorption modeste centrée à 1 µm, avec des variations spatiales de quelques pourcents corrélées aux variations du rapport visible / IR.
La bande à 1 µm est bien visible sur des rapports de spectres, qui permettent de s’affranchir des problèmes d’étalonnage des données. La figure suivante indique que les variations de cette bande d’absorption ne sont pas reliées à la quantité de lumière réfléchie (qui dépend essentiellement de la géométrie d’observation et de l’orientation des reliefs), mais sont au contraire corrélées à la pente des spectres.
Surface properties observed by ISM consist in:
- Small albedo variations (reflectance variations are mostly related to surface inclination).
- A steep red continuum in the NIR.
- No detectable absorption at 3 µm, indicating a very low water contents (< 0.2%).
- A weak absorption band centered at 1 µm, with spatial variations of a few percents correlated to continuum slope variations.
La variabilité des propriétés de surface trahit une histoire géologique plus complexe que l’on ne croyait jusqu’alors :
- la profondeur de la bande d’hydratation indique un contenu en eau maximum de ~0,2% dans les terrains exposés ;
- la position de la bande à 1 µm est incompatible avec une composition dominée par les oxydes de fer ou les phyllosilicates, mais indique un mélange de pyroxènes et d’olivine.
Ces deux propriétés sont en contradiction avec les interprétations précédentes, qui voulaient que la surface de Phobos soit similaire aux météorites de type CM (chondrites carbonées) ou aux astéroïdes de type C ou D. Ces interprétations reposaient sur les données beaucoup moins complètes de Viking et Mariner 9, mélangeant probablement les spectres des unités rouge et bleu.
The position of the 1 µm band is inconsistent with ferric oxides or phyllosilicates, but indicates mafic minerals (pyroxene and olivine) as major components of these areas. Together with the low water contents, this is in disagreeement with previous interpretations proposing carbonaceous chondrites and C or D-type asteroids as the best analogs for Phobos. These interpretations relied actually on observations by Viking and Mariner 9 ranging up to 1 µm only, and probably mixing up the blue and red units.
Les observations d’ISM indiquent au contraire une similitude avec certaines météorites L (chondrites ordinaires sombres), les astéroïdes de type T, et surtout avec les terrains lunaires matures. Les deux figures ci-dessus illustrent cette comparaison (l’unité rouge est un composite KRFM-VSK-ISM, l’unité bleu un composite KRFM-VSK). Une interprétation attrayante est que Phobos s’est formé à l’intérieur du Système solaire (à la distance de Mars) et n’est pas un objet exotique capturé par la planète. L’unité observée par ISM serait largement modifiée sous l’influence des micrométéorites et du vent solaire (“space weathering”) comme c’est le cas sur la Lune. L’autre unité n’est pas bien caractérisée spectralement, mais sa corrélation avec les cratères d’impact indique que le matériau provient de l’intérieur de Phobos ; il pourrait s’agir soit du même matériau fraîchement exposé et non altéré, ou bien d’un matériau différent constituant l’essentiel du volume, qui indiquerait que Phobos est un assemblage de débris ayant connus des histoires très différentes pendant les premiers temps du Système solaire.
Conversely, ISM indicates a similarity with some L meteorites (dark altered chondrites), T-type asteroids, and mainly with mature lunar soils. The last figure above illustrates this; the redder unit is a KFRM-VSK-ISM composite, the bluer unit is a KRFM-VSK composite. An attractive interpretation is therefore that Phobos was formed in the inner solar System and is not an exotic object captured by Mars. The redder unit observed by ISM would be strongly altered by space weathering, as mature lunar soils are. The other unit is not well-characterized spectrally, but its spatial distribution indicates that it comes from the inner parts of Phobos. It could consist of the same material freshly exposed and not yet altered, or alternatively of a different material composing the bulk of the satellite. In this case, Phobos could be a “rubber pile” made up of debris from different bodies with markedly different histories.